
Droit de la distribution et conséquences de la rupture du contrat de distribution : peut-on réclamer une indemnité au titre de la clientèle ?
La Cour de cassation a répondu à la négative à cette question : la fin du contrat de distribution ne donne pas droit à une indemnité de clientèle.
Dans deux arrêts rendus le même jour, la Cour de cassation s’est prononcée sur le droit d’un distributeur à invoquer une indemnité de clientèle sur le fondement de l’enrichissement sans cause à la suite de la rupture de son contrat de distribution.
Au franchisé qui faisait valoir que « le franchiseur qui rompt le contrat de franchise comportant une clause de non-concurrence doit indemniser le franchisé de la perte sa clientèle propre ainsi subie » (pourvoi n°11-21978, ci-après le premier arrêt) et au revendeur qui soutenait que « tout distributeur qui se voit irrémédiablement dépossédé de tout ou partie de sa clientèle au profit de son fournisseur à la suite de la rupture de son contrat de distribution doit être indemnisé de la perte de son fonds de commerce sur le fondement de l'enrichissement sans cause » (pourvoi n°11-25175, ci-après le second arrêt), la Cour de cassation répond que « les règles gouvernant l'enrichissement sans cause ne peuvent être invoquées dès lors que l'appauvrissement et l'enrichissement allégués trouvent leur cause dans l'exécution ou la cessation de la convention conclue entre les parties ».
Ces deux arrêts se prononcent en des termes identiques dans deux situations radicalement différentes : celle où le distributeur est un simple revendeur et celle où il est un franchisé lié par une clause de non-concurrence postcontractuelle insérée dans le contrat de distribution.
Dans une première espèce, un distributeur de produits plasturgiques s’était trouvé privé du droit de distribuer les produits d’un certain fournisseur qui avait rompu ses relations avec lui pour en nouer avec un nouveau distributeur. Ayant perdu une part importante de sa clientèle, le distributeur lui avait réclamé des dommages-intérêts sur le fondement de l’enrichissement sans cause. La Cour de cassation rejette son pourvoi contre la décision d’appel les lui ayant refusés : « les règles gouvernant l'enrichissement sans cause ne peuvent être invoquées dès lors que l'appauvrissement et l'enrichissement allégués trouvent leur cause dans l'exécution ou la cessation de la convention conclue entre les parties ». L’arrêt est parfaitement fondé. Par principe, un revendeur n’a pas un droit à la poursuite d’un contrat de fourniture ; dès lors que la rupture du fait du fournisseur n’était pas infondée ou brutale, aucune indemnité ne peut lui être allouée.
Dans une seconde espèce, un commerçant chargé de recueillir des abonnements téléphoniques auprès d’un opérateur de téléphonie mobile et exerçant l’activité de vendeur d’accessoires avait vu son « contrat de franchise » ) la qualification était contestable mais non contesté en l'espèce - rompu par le franchiseur et s’était vu imposer le jeu d’une clause de non-concurrence postcontractuelle. L’arrêt ici commenté constitue le second rendu par la Cour de cassation dans la même affaire. Dans un premier arrêt, la Cour de cassation avait estimé qu’une cour d’appel ne pouvait rejeter sa demande en indemnité en constatant « tout à la fois, que le franchisé pouvait se prévaloir d'une clientèle propre, et que la rupture du contrat stipulant une clause de non-concurrence était le fait du franchiseur », car l’on en « déduisait que l'ancien franchisé se voyait dépossédé de cette clientèle, et qu'il subissait en conséquence un préjudice, dont le principe était ainsi reconnu et qu'il convenait d'évaluer, au besoin après une mesure d'instruction » (Com. 9 octobre 2007, pourvoi n°05-14118, inédit, CCC 2007, comm. 298, obs. Malaurie-Vignal, D. 2008, p. 388, obs. Ferrier, JCP G 2007, II, 10211, note Dissaux,Rev. Lamy dr. aff. 2007, n° 1354, note Ferré et Debert, Rev. Lamy dr. civil 2008, n° 2891, note Mainguy et Depincé, RJDA 2008, p. 335, obs. Kenfack, RTD civ. 2008, p. 119, obs. Gautier, RDC 2008, p. 410, obs. Behar-Touchais). Débouté devant la Cour de renvoi, le franchisé avait formé un nouveau pourvoi, soutenant que « le franchiseur qui rompt le contrat de franchise comportant une clause de non-concurrence doit indemniser le franchisé de la perte sa clientèle propre ainsi subie ». Le pourvoi est rejeté : « les règles gouvernant l'enrichissement sans cause ne peuvent être invoquées dès lors que l'appauvrissement et l'enrichissement allégués trouvent leur cause dans l'exécution ou la cessation de la convention conclue entre les parties ».
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