
S’il est certain que l’agent commercial peut poursuivre son cocontractant pour le paiement des commissions dues, peut-il également rechercher la responsabilité de la société-mère lorsque son cocontractant est une filiale.
Cette solution présente un avantage certain pour l’agent commercial lésé au cas où la filiale est insolvable.L’agent commercial disposera d’un second débiteur en la personne de la société-mère qui sera alors condamnée à payer les commissions dues par la filiale.
La relation contractuelle n’existe par définition qu’entre l’agent commercial et la filiale. La société mère n’étant pas partie au contrat est un tiers. Cela signifie qu’en principe la filiale est seule débitrice des commissions dues. Toutefois, lorsque la société mère donne directement ses instruction à l’agent commercial ne peut-on considérer qu’elle engage sa responsabilité en cas de défaillance de la filiale ?
Si la réponse est affirmative l’agent commercial pourra alors réclamer à la société-mère le paiemen des commisions.
Telle était la question qui était posée à la Cour de cassation..
En l’espèce, un agent commercial avait assigné, non seulement son contractant en paiement de commissions dues et en dommages et intérêts en réparation de la rupture de son contrat d’agent commercial mais encore, la société mère, dont son contractant était une filiale.
La Cour d’appel avait déclaré la société mère solidairement responsable des condamnations prononcées à l’encontre de la filiale. Sur pourvoi en cassation, l’arrêt est cassé. Selon la Chambre commerciale de la Cour de cassation, en se déterminant ainsi « sans constater que l'immixtion de la société mère avait été de nature à créer pour l’agent commercial une apparence trompeuse propre à lui permettre de croire légitimement que cette société était aussi son cocontractant, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ».
De ce fait, si la société mère s’est immiscée dans les rapports entre sa filiale et un agent commercial contractuellement lié à cette dernière, il est possible de mettre en cause la société mère. Mais il importe de prendre en compte l’ « incidence » de cette immixtion dans la « psychologie » de l’agent commercial qui doit avoir pu légitimement croire que cette société était aussi son contractant. Et cette preuve est assez difficile à rapporter.
En l’espèce, de nombreuses correspondances provenaient de la société mère qui s’adressait directement, au lieu et place de la filiale, à l’agent commercial ; de même, toutes les discussions relatives à la renégociation du contrat d’agence étaient menées par les dirigeants de la société mère. Cela ne justifiait néanmoins pas, pour la Cour de cassation, la condamnation in solidum de la société mère. En effet, si les éléments matériels de l’immixtion sont bien présents, il importe d’établir la répercussion que cela a eue sur la psychologie de l’agent commercial, en créant à son égard une apparence trompeuse.
Com., 12 juin 2012 (n° 11-16109)
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